Le code pénal et la procédure pénale chinoise (Fr)

Le nouveau Code pénal chinois entré en vigueur le 1er octobre 1997 a été révisé le 28 février
2009 par l’amendement VII, et le Code de procédure pénale chinois promulgué le 17 mars
1996 est entré en vigueur le 1er janvier 1997. Les dispositions générales de ces Codes
précisent que le but est d’assurer l’exactitude dans l’établissement des faits incriminés,
l’application correcte de la loi, la punition des criminels et la protection des personnes
innocentes afin de sauvegarder le système juridique socialiste et de garantir aux citoyens la
protection des droits de la personne, du droit de propriété, des droits démocratiques et d’autres
droits, et d’assurer la sécurité publique économique et sociale et le développement de la cause
socialiste..

La loi pénale chinoise s’applique aux infractions commises sur le territoire national et à
certaines infractions commises à l’étranger. L’étendue de la compétence extraterritoriale est
déterminée par la nationalité du délinquant et la nature de l’infraction.

En matière de contrefaçon et de falsification de monnaie ou de titres négociables, de corruption, de violation des secrets d’Etat, d’usage de la fausse qualité de fonctionnaire, les nationaux sont toujours punissables lorsque les faits sont commis à l’étranger.

En dehors de ces cas, les nationaux peuvent également être poursuivis pour des agissements perpétrés à l’étranger, cependant ils pourraient bénéficier d’une exemption lorsque la peine maximale prévue par la loi chinoise est inférieure à une peine de trois ans d’emprisonnement.

Le Code pénal chinois ne s’applique aux infractions commises par les étrangers en dehors du territoire chinois que lorsque les agissements reprochés ont porté atteinte à la République ou aux ressortissants chinois, qu’ils sont réprimés par la loi du lieu de commission, et que la peine minimale prévue par la loi chinoise est une peine de trois ans d’emprisonnement.

Lorsque la loi pénale a une application extraterritoriale, les juridictions nationales ont
compétence même lorsque les faits ont été jugés par une juridiction étrangère. Mais si la peine
prononcée a été exécutée à l’étranger, les juridictions chinoises ont la faculté soit de réduire la
peine encourue soit de prononcer une exemption de peine.

En ce qui concerne l’application de la loi pénale dans le temps, l’art. 12 du Code pénal
consacre le principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle en exigeant que les agissements
reprochés ne soient punis qu’à condition d’être incriminés par la loi applicable au moment des
faits. Ce principe est atténué, comme dans la plupart des systèmes juridiques modernes, par la
rétroactivité in mitius qui permet à tout accusé de bénéficier de plein droit de l’application des
dispositions de la loi nouvelle plus douce.

Les éléments constitutifs de l’infraction en Droit chinois sont les mêmes qu’en Droit français. On retrouve l’exigence d’un élément légal, d’un élément matériel et d’un élément intentionnel.

L’élément intentionnel a une grande importance en droit pénal chinois car il détermine la classification des infractions. Au lieu de la classification tripartite du Droit français, on ne connaît que deux catégories d’infractions en Droit chinois; d’une part, les infractions intentionnelles et d’autre part, les infractions non intentionnelles.

Les infractions mineures équivalentes aux contraventions selon la classification française, sont qualifiées d’infractions « administratives » et ne relèvent pas de la compétence des Tribunaux.

Cette présentation sommaire du système chinois, se limitera à la description des principales
caractéristiques du Droit Pénal et aux éléments importants de la procédure applicable.

I. – Les principales caractéristiques du Droit Pénal chinois

Le Droit Pénal chinois repose sur une conception particulière de la notion d’ordre public et sur
un système de responsabilité classique.

A. – La notion d’ordre public

1. – En Droit Pénal général

En Chine la notion d’ordre public couvre à la fois l’ordre public tel qu’il est conçu par la
plupart des pays occidentaux, et la protection de l’idéologie socialiste.

L’ordre public au sens traditionnel du terme est protégé en Chine par plusieurs catégories d’infractions dont les infractions contre les droits personnels et démocratiques des citoyens, les infractions contre la sécurité publique, les atteintes aux biens, les infractions contre l’ordre public. Certains agissements qui relèvent de la responsabilité civile en France sont pénalement sanctionnés du fait de l’importance qui leur est accordée dans la tradition chinoise.

Tel est le cas par exemple de la cohabitation avec l’épouse d’un militaire en service ou encore de la non- assistance à des parents nécessiteux ou malades.

Aucune disposition du Code ne sanctionne les délits politiques ni les délits d’opinion.

Mais la protection de l’idéologie socialiste est assurée par l’incrimination d’agissements portant atteintes à la sécurité de l’Etat.

Sont réprimés à ce titre tous les agissements ayant pour but le renversement le régime socialiste et ceux portant atteintes à la souveraineté, à l’intégralité territoriale et à la sécurité de la République Populaire de Chine. Les articles 102 à 113 du Code pénal énumèrent de façon non limitative ces actes parmi lesquels figurent: l’incitation à la désertion, l’espionnage et l’incitation des masses à la révolte.

2. – En droit Pénal des affaires

Le Code pénal chinois sanctionne divers agissements au titre de la protection de l’ordre
économique socialiste. On retrouve parmi ces agissements, la fraude financière, la fraude
fiscale et douanière, la contrebande et la violation des droits des propriété intellectuelles et
industrielles.

Certaines activités économiques parfaitement légales dans la plupart des systèmes juridiques modernes peuvent être jugées attentatoires à l’ordre économique socialiste.

En 1988, un contrat d’importation de télévision, conclu entre une société française et une filiale du ministère chinois de l’aéronautique apparemment compétent en la matière, a été considéré comme une vaste fraude portant atteinte à l’économie du pays.

L’agent commercial employé par la société française, qui avait perçu une commission et reçu un important dépôt de garantie pour le compte de son employeur a été incarcéré pour contrebande et malversations.

Il encourait la peine capitale car, étant de nationalité chinoise, il ne pouvait bénéficier du traitement de faveur réservé aux expatriés. Les autorités chinoises ayant participé à la signature du contrat ont été démises de leurs fonctions et également incarcérées pour contrebande. La société française n’a pas été inquiétée, et la transaction commerciale n’a pas été remise en cause à son égard.

B. – Le système répressif

La responsabilité pénale et les sanctions prononcées dépendent de la personnalité du
délinquant et de la gravité des faits.

1. – La responsabilité pénale

En Chine, la majorité pénale est fixée à 16 ans.

Mais les mineurs de 14 ans sont punissables pour certaines infractions considérées comme portant gravement atteinte à l’ordre public, comme l’homicide volontaire, les blessures graves, le viol et le trafic de drogue etc.

Les peines encourues sont alors inférieures à celles prévues par la loi. Les sourds-muets et aveugles bénéficient également de cette atténuation.

Comme dans la plupart des systèmes juridiques, les malades mentaux qui n’ont pas eu
conscience de la portée de leurs agissements sont pénalement irresponsables.

De même la force majeure et la légitime défense sont exonératoires de responsabilité.

En toute hypothèse, l’art. 3 du Code pénal prévoit que les infractions non intentionnelles ne
sont punissables que dans les cas prévus par la loi.

La plupart des infractions non intentionnelles sont sanctionnées mais les peines encourues sont beaucoup moins importantes.

Par exemple en matière d’homicide volontaire, la peine encourue est la mort, l’emprisonnement à vie ou un emprisonnement ne pouvant être inférieur à 10 ans. Si des circonstances atténuantes sont retenues la peine va de 10 ans d’emprisonnement à 3 ans (article 232 du code pénal). Par contre lorsque l’homicide est involontaire la peine va de 3 à 7 ans d’emprisonnement. Si des circonstances atténuantes sont

retenues, la peine va de 3 ans à 6 mois d’emprisonnement (article 233 et 45 du Code Pénal)
Pour toute infraction, l’accusé peut bénéficier de circonstances atténuantes, la principale cause
d’atténuation voire d’exemption de peine en cas d’infraction mineure étant la reddition
volontaire.

2 – Les sanctions pénales

Le Code Pénal chinois prévoit cinq peines principales et trois peines accessoires.

Les peines principales sont les suivantes:
(i) la mise sous surveillance de trois mois à deux ans, peine non privative de liberté qui oblige le condamné à présenter des rapports sur ses activités et
à obtenir une autorisation pour tout déplacement;
(ii) la détention d’un mois à 6 mois qui se déroule dans une maison de détention où le condamné exerce une activité rémunérée;
(iii) l’emprisonnement de 6 mois à 15 ans;
(iv) l’emprisonnement à perpétuité;
(v) la peine de mort qui est encourue depuis 1982 pour des infractions économiques.
Elle peut être assortie d’un sursis à exécution de deux ans pendant la durée duquel le délinquant bénéficie d’une «réformation par le travail » et peut, s’il ne commet aucun autre crime volontaire, obtenir que sa peine soit commuée en une peine d’emprisonnement à perpétuité ou d’une durée de 15 à 20 ans.

Les Tribunaux populaires peuvent à titre accessoire, prononcer soit une peine d’amende soit la privation des droits politiques pendant une durée de un à cinq ans, soit encore la confiscation totale ou partielle des biens.

II. – La procédure pénale

Le pouvoir judiciaire est réparti par l’art. 3 du Code de procédure pénale entre les organes de
la sécurité publique chargés de l’enquête préparatoire et de la détention préventive, les
parquets populaires qui approuvent l’arrestation, contrôle sa légalité et mettent en oeuvre
l’action publique, et les Tribunaux. Nous n’aborderons que les dispositions relatives à
l’arrestation et la détention et les principes directeurs du procès.

A. – Les dispositions relatives à l’arrestation et à la détention.

L’organe de sécurité publique qui souhaite procéder à une arrestation doit obtenir l’autorisation du Tribunal ou du Parquet.

En cas de refus, il peut demander un réexamen.

C’est également le seul pouvoir dont il dispose lorsque le Parquet refuse d’engager des poursuites pénales suite à une enquête préliminaire.

En cas d’urgence, l’organe de sécurité publique peut détenir des personnes surprises en flagrant délit ou suspectées de crimes graves, sans y avoir été autorisé.

Dans ce cas, il doit en informer le parquet dans les trois jours et si ce dernier n’autorise pas l’arrestation, dans les trois jours, la personne détenue doit être immédiatement libérée.

La détention pendant l’enquête préliminaire ne peut excéder deux mois. Si l’enquête ne peut
être clôturée à l’issue de ce délai, le Parquet peut accorder un délai supplémentaire d’un mois.

Tel était le cas dans l’affaire du contrat d’importation, précédemment mentionnée.

L’agent commercial a été détenu pendant 12 mois sans qu’aucun chef d’inculpation ne soit retenu par le Tribunal populaire. Une première inculpation pour malversations a été transmise au Tribunal après 4 mois de détention. Le Tribunal l’ayant rejetée pour insuffisance de preuves, une nouvelle inculpation a été présentée 3 mois plus tard.

Malgré le rejet de ce second chef d’accusation, seule une libération « sous garantie pour soins médicaux » a été obtenue 5 mois plus tard. Cette libération a été rendue possible en raison de l’acquisition de la nationalité française par le détenu en sa qualité de conjoint d’une ressortissante française.

B – Les principes directeurs du procès.

Tout accusé doit avoir communication de l’acte d’accusation au plus tard dix jours avant la date d’audience.

Le droit à la défense est affirmé par le Code de procédure pénal, de plus la loi de 2001 et de 2008 concernant l’exercice de la profession juridique ont réaffirmé et renforcé les droits des avocats dans la procédure pénale pour assurer la défense pénale de leur client.

La procédure pénale est accusatoire, le débat se déroulant entre l’accusé, le procureur et
éventuellement la partie civile. Les modes de preuve usuels sont reconnus et l’aveu de l’accusé
n’a pas à lui seul de valeur probante. Les enregistrements magnétiques, qui sont d’usage très
courant en Chine, ont force probante même lorsqu’ils ont été effectués à l’insu de
l’interlocuteur.

La présomption d’innocence n’est pas reconnue par le Code de procédure pénale. Le défenseur
de l’accusé a la faculté de fournir des preuves dans le but de faire reconnaître son innocence.
Dans la pratique, les avocats du prévenu sont souvent désignés par le Tribunal. Ils ont pour
mission d’encourager leur « client » à reconnaître les faits afin de faciliter la manifestation de
la vérité et de bénéficier de l’indulgence des juges.

En toute hypothèse, lorsque les juges délibèrent séance tenante, ils ont l’obligation de
communiquer le jugement aux parties dans les cinq jours. Par contre lorsque la décision est
renvoyée à une audience ultérieure, des copies du jugement doivent être délivrées aux parties
séance tenante. Le délai d’appel ne court qu’à compter de la réception du jugement.

Conclusion

Nonobstant la relative indépendance des juges vis-à-vis du Parquet, l’expérience a montré qu’en matière de crimes économiques, il est difficile pour les inculpés d’établir leur bonne foi.

Il est donc vivement recommandé aux entreprises occidentales qui traitent des affaires mettant en jeu des sommes considérables de s’assurer de la légalité des opérations envisagées, tout particulièrement lorsqu’elles ont recours à des intermédiaires nationaux.

Une consultation juridique émanant de l’un des grands cabinets d’affaires chinois de la place est donc une exigence impérative, préalablement à la conclusion de tout accord.

Depuis ces dix dernières années on assiste à un important débat sur les infractions portant sur la sécurité d’Etat, le Droit Pénal des affaires, la peine capitale et les droits des accusés dans la procédure pénale, tous ces débats ont eu certaines conséquences positives sur la législation du droit pénal.

Il est donc important de noter que le droit pénal chinois a considérablement évolué et a connu beaucoup de progrès, on ne peut qu’espérer qu’il répondra tant aux exigences de l’évolution sociale de la Chine qu’à celles des échanges internationaux.